L’Ex-Lofteur

Vaguement conscient du caractère factice et, c’est à souhaiter, fort éphémère de sa célébrité, l’ex-lofteur veut profiter au maximum de sa notoriété avant qu’elle ne disparaisse. Entre un spot de pub laborieux et un passage pénible derrière un micro, l’ancien détenu cherche bien sûr à rentabiliser sur le plan sentimental son séjour devant les caméras. Son expérience de captivité lui a laissé un goût amer d’eau chlorée, et même s’il a parfois pu " conclure ", il est loin d’avoir trouvé son équilibre.

D’un physique relativement banal, même s’il lui prend des accès de culturisme au petit matin, l’ex-lofteur se distingue par une coupe décolorée pitoyable, des lunettes d’un goût douteux ou encore un sourire artificiel de pantin cathodique. Ces quelques détails sont cependant suffisants pour qu’on le reconnaisse dans la rue, du moins jusqu’à ce qu’on ait oublié jusqu’à son existence (c’est à dire d’ici une semaine environ).

En mobylette, puisqu’il a dépensé tout l’argent qu’il avait réussit à amasser lors de son séjour sartrien. Fini les voitures de fonction louées par la production pour ses sorties nocturnes, c’est aujourd’hui en moteur deux-temps qu’il circule, ce qui peut se révéler être un avantage, puisque son casque le protège d’éventuels fanatiques qui, l’ayant reconnu, pourraient le poursuivre jusqu’au prochain feu rouge.

Réciter le nom des capitales des pays africains, vivre son quotidien au jour le jour, écouter Mylène Farmer, lire Schopenhauer (en cachette aux toilettes), parler le langage de son époque, et raconter sa vie jusqu’à extinction de l’intellect, ce qui arrive somme toute assez rapidement. Et surtout, surtout, passer à la télé (en beuglant " Lofteurs Up & Down " si possible), profitant ainsi de son quart d’heure warholien.

Les nominations, les autres ex-lofteurs, la faim dans le monde et les vigiles de boites de nuit qui le tabassent et font mine de ne pas le reconnaître, ceux qui pensent qu’il n’a rien fait par lui-même et le milieu artistique qui ne reconnaît pas son talent (qu’il pensait avoir suffisamment prouvé en animant la quinzaine de la charcuterie auvergnate au Leader-Price de Romorantin -15 juillet 2001). 

Toute femme ayant des relations dans le domaine artistique/télévisuel/menuiserie, et capable de l’introduire dans les hautes sphères de l’animation de banquets de mariages et kermesses.

" Et oui tu sais, deux mois dans le loft, ça change toute une vie… Si tu te sens prête pour une Loft Story, et que t’es OK, c’est OK ! Ouais ! Coool ! Wouuuhh !! "